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  • Laurent Blanc est-il un traitre ?

    « Blanc et la FFF : traîtres à la nation ? » La question est ouvertement polémique. Elle vient en tout cas mettre un peu d’eau dans le moulin de ceux qui pensent que l’affaire Mediapart, la polémique des quotas, a été trop vite étouffée. Et alors que Pape Diouf, l’ancien président de l’OM, tentait de faire preuve de mesure en rappelant que le football n’est pas raciste mais qu’il « discrimine », Erwan Poiraud, directeur de l’ICD, l’Institut International du Commerce et du Développement, a publié une tribune dans laquelle il ne se montre pas tendre avec les dirigeants du foot français. La preuve avec la question initialement posée…

    Du statut d’idole à celui de racaille

    Pour lui, cette polémique renvoie directement au fiasco de la Coupe du Monde 2010. Et ses origines sont typiquement sociales : « Le sociologue Stéphane Beaud vient de nous rappeler dans un ouvrage récent à quel point l’unanimisme qui a prévalu pour analyser la grève des footballeurs français relevait de représentations sociales et de mécanismes médiatiques extrêmement ancrés parmi les commentateurs de l’époque. En un mot, qui rabougrit nécessairement la démonstration sociologique, lorsque les Bleus gagnent en 1998 c’est la victoire de l’unité, de la diversité, de la République solidaire et de la France réunifiée ; lorsqu’ils perdent en 2010, ce ne sont plus de bons Français, ce sont des « racailles » de banlieues, et même des Traîtres à la nation. » Voire des talibans, comme l’a dit Jean Alesi cette semaine…

    Erwan Poiraud rejoint en tout cas Pape Diouf sur le fait que le véritable débat qu’aurait dû soulever cette affaire a été escamoté :  chacun a ainsi pu assister à « un débat enflammé sur la teneur de ses propos et sur les interprétations de conversations menées à bâtons rompus (Laurent Blanc est-il raciste ? La FFF a-t-elle cautionné les propos tenus ? Quelles sanctions appliquées aux protagonistes de la réunion ?). Une montée au créneau très rapide se fait par des entrepreneurs de morale, toujours très prompts à la prise de position scandalisée. En l’occurrence, le nationalisme exacerbé du moi de juillet 2010 a laissé place à un républicanisme anti-raciste au printemps 2011. Dans les deux cas, le débat cherche à être détourné lorsque certains acteurs de l’événement essayent de faire croire que la faute la plus grave est celle de celui qui rapporte les propos tenus, la taupe ou le traître, plutôt que celle de ceux qui ont commis les faits incriminés ».

    Et si l’on (se) posait les vraies questions ?

    On se souvient en effet des propos de Fernand Duchaussoy et d’autres grands noms du foot hexagonal cherchant à tout prix à démasquer la taupe… qui s’est démasquée elle-même, en la personne de Mohammed Belkecemi, Conseiller technique national pour le foot des quartiers. Aujourd’hui, oui, on sait qui a enregistré les propos tenus lors de la réunion du 8 novembre 2010. Et alors ? Cela a-t-il aidé à faire avancer le débat ? Non, naturellement. Non, aussi, parce que, comme nous l’avons déjà dit et redit, le débat n’a tout simplement pas eu lieu. Si la morphologie des joueurs, le « problème » des binationaux a été évoqué, tout le monde est conscient que ceux-ci ne sont pas le cœur du problème : « On assiste moins à un débat sur des discriminations racistes qu’à un débat sur des discriminations sociales. Les termes « blacks » ou « arabes », s’en véritablement qu’on s’en rende compte, désignent tout autant une couleur de peau qu’une situation sociale emprunte de « déviance ». Pour un homme comme Laurent Blanc, issu d’un monde ouvrier traditionnel et engagé, être « black » ne représente pas tant un étranger ou un ennemi, qu’un jeune de cité socialement déstructuré qu’il faut (re-)cadrer. Le rôle du sociologue et des intellectuels est de donner des armes intellectuelles pour penser le monde un peu autrement dans cette affaire. » Certes, mais à la vitesse où l’affaire a été étouffée, difficile d’entamer cet autre cheminement de pensée, qui ne peut aboutir du jour au lendemain…

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